Le 27 avril 2016, la Commission et la Haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité ont rendu publique une déclaration conjointe intitulée « Une politique arctique intégrée de l’Union européenne »1http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=JOIN:2016:21:FIN&from=EN, qui rompt symboliquement avec la prudence des précédentes initiatives de l’UE relatives à cette aire.
Ce document n’est pas une stratégie de l’UE sur l’Arctique, mais il en préfigure les grandes lignes. La déclaration conjointe est destinée au Conseil et au Parlement européen qui, à terme, adopteront formellement une stratégie de l’UE sur l’Arctique. Le Conseil et le Parlement avaient invité en 2014 la Commission et la Haute représentante à développer un cadre plus cohérent pour les actions de l’UE dans cette zone.
Le premier paragraphe de la déclaration conjointe reflète le nouveau ton proposé : « L’UE a stratégiquement intérêt à jouer un rôle central dans cette région ». L’UE n’a pas seulement une légitimité indirecte à être un acteur de l’Arctique (par le soutien à la recherche, à l’éduction…), mais elle y a des intérêts directs qui justifient une attitude plus proactive et volontariste. Renforçant sa prétention à y jouer un rôle croissant, le document rappelle que trois États de l’UE sont membres du conseil de l’Arctique (le Danemark, la Suède et la Finlande) et sept y sont observateurs permanents (l’Allemagne, l’Espagne, la France, l’Italie, les Pays-Bas, la Pologne et le Royaume-Uni).
Ce ton plus offensif se retrouve à plusieurs reprises. Les États riverains de l’océan Arctique eux-mêmes deviennent ainsi des « partenaires arctiques ». La déclaration conjointe émet également des critiques fermes relatives à l’initiative du « G5 » en juillet 2015, visant à réguler les activités de pêche dans l’océan Arctique central, sans se conformer au droit de la mer.
La déclaration conjointe d’avril 2016 a une structure relativement classique (que l’on retrouve dans la plupart des stratégies arctiques des États riverains) :
- la lutte contre le changement climatique et la sauvegarde de l’environnement arctique ;
- le développement durable dans et autour de l’Arctique ;
- la coopération internationale sur des questions intéressant la région arctique.
En plus du financement de la recherche (axe déjà investi), l’UE se positionne comme un financeur potentiel (et d’une certaine manière comme l’un des garants) du « développement économique durable en Arctique », pour justement tenter de dépasser les contradictions de cette formule. Les défis économiques et environnementaux sont spécifiques à cette zone, et intriqués.
Le document inclut des initiatives concrètes, et inclusives (à la différence du Conseil de l’Arctique…), à l’image de la proposition d’un Forum des parties prenantes.
Le Conseil de l’Union européenne, dans ses conclusions2http://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2016/06/20-fac-conclusions-arctic/ du 20 juin 2016, conforte principalement deux axes d’action présents dans la déclaration conjointe de la Commission et de la Haute représentante : le renforcement de la résilience socioéconomique de l’Arctique, et le renforcement de la résilience environnementale.
Le ton de la réaction du Conseil à la déclaration conjointe d’avril 2016, s’il est sur la forme moins offensif, marque bien une volonté de peser davantage sur les questions arctiques, à l’image du point 3 : « Bien qu’il reconnaisse que cette responsabilité incombe surtout aux États arctiques, le Conseil estime que de nombreuses questions touchant la région peuvent être traitées plus efficacement dans le cadre de la coopération régionale ou multilatérale »3http://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-10400-2016-INIT/fr/pdf.