ÉTATS‑UNIS
Citigroup rejoint les rangs des banques arrêtant d’investir dans des projets pétroliers en Alaska, dont l’équilibre financier est également menacé par la chute du cours du pétrole
Depuis fin 2019, le nombre de banques américaines ayant décidé d’arrêter d’investir dans des projets pétroliers en Alaska ne cesse de croître.
Le 20 avril 2020, Citigroup a publié une nouvelle directive de développement durable (« Environmental and Social Policy Framework ») qui exclut les investissements dans les projets pétroliers en Alaska. À ce jour, plus d’une douzaine de banques ont fait le même choix. Cette annonce a été effectuée le jour même du crash pétrolier (cotation négative du brut étatsunien). Ces décisions exacerbent de plus en plus les difficultés budgétaires rencontrées par l’Alaska et ses habitants.
Les États-Unis ont annoncé une aide de 12.1 millions de dollars pour le Groenland
Continuant à renforcer ses liens avec le Groenland, les États-Unis ont annoncé le versement d’une aide financière de 12.1 millions de dollars.
Le 23 avril 2020, les États-Unis ont annoncé une aide financière de 12.1 millions de dollars pour le Groenland. Ce soutien s’inscrit dans un renforcement des liens entre le Groenland et les États-Unis, ces derniers ayant déjà annoncé la réouverture d’un consulat américain à Nuuk. Cette aide financière sera destinée aux ressources naturelles et à l’éducation. L’île occupe une place de plus en plus centrale pour la défense américaine et leur système d’alerte antimissile balistique. Cette aide a été critiquée par certains responsables politiques danois qui indiquent que les États-Unis essaient de créer des divisions entre le Danemark et le Groenland, mais doit être relativisée face aux investissements danois (voir partie Groenland/Danemark et rapport trimestriel n°4).
La faillite du principal opérateur aérien de l’Alaska due à la crise sanitaire met en péril les communautés
À la suite de la crise sanitaire qui a entraîné la perte de 90 % du nombre de ses passagers, RavnAir s’est déclarée en faillite le 5 avril 2020.
Le 5 avril 2020, la compagnie RavnAir a dû brutalement cesser toutes ses opérations aériennes. La perte de 90 % de ses passagers a poussé RavnAir à se déclarer en faillite. Très problématique pour les communautés de l’Alaska dépendantes des vols pour leurs ravitaillements, cet arrêt a causé de nombreuses inquiétudes. Le 15 avril, le North Slope Borough a saisi, après accord avec RavnAir, une partie de ses hangars et équipements afin de permettre le ravitaillement des communautés. Par ailleurs, Everts Air Cargo, basé à Fairbanks, pourrait racheter une grande partie des actifs de RavnAir.
CANADA
Le tourisme risque d’être fortement touché par les mesures prises contre le Covid‑19
Le tourisme risque d’être fortement touché du fait des restrictions et interdictions touchant les navires dans le Passage du Nord-Ouest, de la fermeture de la frontière entre le Yukon et l’Alaska, et de l’annulation des croisières.
Avec la fermeture des frontières et l’interdiction de voyager au Nunavut, le secteur de l’industrie est déjà lourdement affecté. Selon Travel Nunavut, un quart des entreprises du secteur du tourisme a connu une baisse de plus de 50 % des revenus entre janvier et mars 2020. Ce dernier emploie, dans le Territoire, 3 000 personnes et injecte 300 millions de dollars dans l’économie. Sans améliorations dans les mois à venir, 30 % des entreprises liées au tourisme prévoient une fermeture définitive.
De plus, jusqu’au 30 juin, les navires de tourisme et de loisirs transportant plus de 12 passagers ont interdiction de s’engager dans les eaux canadiennes, à l’exception d’opérations essentielles. Le croisiériste Holland America a annoncé avoir annulé presque toutes ses croisières en Alaska pour l’été et ses excursions au Yukon. Neil Hartling, président de The Tourism Industry Association of Yukon, a qualifié cette annonce « d’astéroïde frappant l’industrie du tourisme », Holland America injectant entre 40 et 60 millions de dollars par an dans l’économie du Yukon. Sources : Nunatsiaq, CBC, SeaTrade.
Le secteur des mines également fortement touché par les mesures prises contre le Covid‑19
L’extraction minière dans le Nord canadien est soit ralentie, avec le renvoi dans leur communautés des travailleurs inuits, soit complètement arrêtée, mettant en difficulté le secteur qui apporte le plus de revenus pour l’ensemble de l’Arctique canadien.
Le secteur des mines est également touché dans tout l’Arctique canadien du fait des nombreuses mesures mises en place pour lutter contre la propagation du virus Covid‑19 dans le Nord. Au Nunavik, la société Makivik, qui représente les Inuits, a peur de voir le virus se propager avec les rotations de travailleurs du sud dans les mines. Alors que les mines ont reçu le feu vert pour rouvrir, Makivik s’oppose donc à leur reprise d’activité, notamment celle de la mine Raglan, opérée par Glencore près de la communauté de Salluit. Cette décision a été prise par Québec sans concertations avec les Inuits du Nunavik ; Makivik souhaite contester cette décision en justice pour faire cesser les activités des mines.
Les mines du Nunavut ont pour leur part réduit leurs activités et renvoyé chez eux les travailleurs inuits, annonçant que l’impact de ces mesures sera significatif sur les activités à venir des mines. Sabina Gold et Silver Corp., situées dans l’ouest du Nunavut, ont suspendu leurs activités de prospection. La mine d’or Meliadine, de l’entreprise Agnico Eagle Mines, s’est confinée jusqu’au 27 avril, en réduisant son personnel de 50 % et en limitant les transferts avec le sud, aux urgences. Premier secteur avant le tourisme, les revenus des mines sont estimés à 1,315 milliard de dollars en 2019.
Dans les Territoires du Nord-Ouest (TNO), la plus grande mine de diamants, Ekati, appartenant à l’entreprise Dominion Diamond, et située à 300 km de Yellowknife, a fait une demande de placement en protection contre insolvabilité. Détenant une dette de 550 millions de dollars, sa production a été stoppée dès le 19 mars des suites des mesures prises contre le Covid‑19. Selon le bureau des statistiques des TNO, le secteur de l’extraction de diamant contribue de 1,7 milliard au PIB des TNO, et cette fermeture va impacter les revenus du Territoire.
Enfin, au Yukon, la mine d’or Eagle Gold Mine de l’entreprise Victoria Glod, située près de Mayo et opérationnelle en septembre 2019, continue de produire de l’or alors que les cours montent et que la Première Nation des Na-Cho Nyak Dun de Mayo a demandé au gouvernement du Yukon de fermer les mines du Territoire durant la crise sanitaire. Sources : Eye on the Arctic, La Presse, Nunatsiaq, CBC, Nunatsiaq.
Le gouvernement fédéral débloque de l’argent pour le Nord dans le cadre du Covid‑19
Le gouvernement a annoncé au moins 130 millions de dollars en soutien aux communautés du Nord canadien, dont 17 millions pour soutenir le transport aérien, vital pour nombre de communautés uniquement accessibles par avion l’hiver.
Près de 130 millions de dollars ont été annoncés pour soutenir les trois territoires du Nord dans le cadre de la crise sanitaire liée au Covid‑19. Parmi eux, 17 millions de dollars vont aider à compenser une partie des frais permettant de s’assurer que les compagnies aériennes du nord ravitaillent les communautés en produits de première nécessité. ITK avait en effet déploré la diminution – voire même la suppression – des vols à destination de certaines communautés inuites, du fait des mesures prises pour limiter la propagation du virus. Le gouvernement du Nunavut paye 2,25 millions de dollars par semaine pour compenser les sièges vides et maintenir un service aérien minimum de ravitaillement. 25 millions de dollars seront également débloqués par le gouvernement fédéral pour apporter un complément au programme Nutrition Nord qui subventionne certains produits alimentaires et d’hygiène dans les magasins des communautés. Dans le même temps, NTI a débloqué 2 millions de dollars pour faire livrer des repas aux personnes dans le besoin. Selon le ministre des Finances et de la Santé du Nunavut, le Territoire aurait perdu, au 16 avril 2020, entre 20 et 24 millions de dollars de revenus du fait des effets de la crise sanitaire. Au-delà de tous ces montants annoncés, le ministre des Affaires du Nord Dan Vandal a fait savoir que si le Nunavut avait besoin de davantage de soutien du fédéral, ce dernier répondrait présent. Sources : Nunatsiaq, Eye on the Arctic, Nunatsiaq, Nunatsiaq, Nunavut News.
Les Rangers mobilisés dans les communautés pour le Covid‑19
Les Rangers canadiens ont été mobilisés dans plusieurs communautés afin d’aider à lutter contre la pandémie de Covid‑19 à travers l’Arctique canadien.
Le chef d’État-Major de l’Armée canadienne, Jonathan Vance, ainsi que le Premier ministre Justin Trudeau ont autorisé le déploiement de l’armée si nécessaire afin d’aider les collectivités dans la lutte contre le Covid‑19. Dans ce cadre, les Rangers canadiens ont été mobilisés dans les communautés du Nord pour aider à gérer la crise sanitaire. Sur demande des autorités locales, les Rangers ont été déployés au Nunavik pour installer des tentes de tri devant les centres de santé de cette région et informer la population sur les mesures à respecter. Des Rangers du 1er Groupe de patrouilles des Rangers canadiens, basé à Yellowknife, ont également été mobilisés dans plusieurs communautés des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut. Sources : The Globe and Mail, Regard sur l’Arctique, Nunatsiaq.
GROENLAND/DANEMARK
Le gouvernement groenlandais s’inquiète d’une augmentation des activités minières sur l’îles de Baffin au Canada
Le trafic maritime associé à une mine de fer sur l’île de Baffin serait appelé à doubler, ce qui pourrait affecter, entre autres, les narvals de l’ouest du Groenland.
Le ministère de la Nature et de l’Environnement a signalé aux autorités canadiennes que l’extension des activités minières sur l’île de Baffin (minerai de fer) pourrait avoir des conséquences notamment sur les mammifères marins sur la côte ouest du Groenland. La société minière Baffinland Iron Mines Corporation a exprimé le souhait de doubler la production de minerai de fer dans une mine du nord de l’île de Baffin. Cela entraînerait un doublement du trafic maritime à destination et en provenance de la mine. Le ministère est préoccupé par l’impact du trafic maritime sur les narvals, les morses et les phoques, espèces particulièrement sensibles aux bruits associés au transport maritime (moteurs et sonars). En outre, l’utilisation de brise-glaces provoque également des inquiétudes. Source : Nunatsiaq news, 20 avril 2020, Sermitsiaq AG le 21 avril 2020, Radio Canada International, 22 avril 2020).
Air Greenland en mesure de poursuivre ses activités relativement sereinement
Malgré les pertes importantes liées à l’arrêt des vols dans le contexte de la pandémie de Covid‑19, la compagnie aérienne Air Greenland conservera suffisamment de liquidités pour terminer l’année sans aide supplémentaire du gouvernement.
Le maintien de l’activité de la compagnie est notamment dû à un effort salarial substantiel de son personnel, à une négociation avec les banques relative à la gestion du fonds de pension de la compagnie, et au maintien de différents contrats de service avec les gouvernements groenlandais et danois, pour l’armée américaine, et pour les évacuations sanitaires. Air Greenland a en outre revu ses routes à la baisse afin d’optimiser la situation en période de reprise des vols intérieurs (25 avril).
Fait notable pour la compagnie, durant la crise, Air Greenland a notamment battu son propre record de durée de vol en Dash‑8 (7 heures 52, Nuuk-Copenhague) ceci dans le cadre d’une évacuation sanitaire. Sources : Sermitsiaq AG 21 avril (a), 21 avril (b), 21 avril (c), 22 avril 2020, 27 avril 2020.
Les États-Unis offrent une assistance de 12.1 millions de dollars au Groenland
Cette assistance, qui prendra la forme d’expertise et de services, génère de nombreuses réactions tant au Groenland, qu’au Danemark et à l’étranger.
Dans un éditorial du 20 avril, publié dans le journal en ligne Altinget, Carla Sands, Ambassadrice des États-Unis au Danemark, précisait, avec des mots particulièrement durs pour la Chine et la Russie, la position des États-Unis en Arctique. L’ambassadrice y annonçait la préparation d’un ensemble significatif d’aides à l’intention du Groenland. Cette annonce et sa confirmation le 23 avril ont généré de nombreuses réactions. À la suite de son acceptation par le gouvernement groenlandais, l’opposition locale a souligné combien cela pouvait menacer l’autonomie du Groenland. La forme de cette aide, des prestations de service par des experts américains, est notamment critiquée car elle semble a priori donner un accès privilégié aux experts en question sans que leur rôle ne soit précisé. Certains politiciens danois y voient une manœuvre destinée à affaiblir les liens entre le Danemark et le Groenland. Finalement, l’Ambassadeur de Russie s’est insurgé contre la rhétorique belliqueuse utilisée par les États-Unis à cette occasion. Sources : Altinget le 20 avril 2020, Sermitsiaq 21 avril 2020, le 22 avril 2020 (a), le 22 avril 2020 (b), le 22 avril 2020 (c), le 23 avril 2020 (a), le 23 avril 2020 (b), le 23 avril 2020 (c), Arctic Today le 23 avril 2020, le 24 avril 2020, Sermitsiaq AG le 26 avril 2020, Arctic Today le 27 avril 2020.
La présence diplomatique des États-Unis à temps plein se précise
Dossier présent dans l’actualité depuis plusieurs mois, la question du consulat des États-Unis à Nuuk se précise du point de vue de la localisation (immeuble du Joint Arctic Command de l’Armée danoise, du moins dans un premier temps) et de la personne (un diplomate actuellement en poste à Copenhague, Sung Choi).
Ces éléments ont été communiqués par Carla Sands, Ambassadrice des États-Unis au Danemark, lors d’une conférence de presse donnée le 23 avril 2020. Sung Choi est actuellement Premier secrétaire et responsable des affaires politiques de l’Ambassade des États-Unis au Danemark. Le Joint Arctic Command supervise toutes les activités des forces armées danoises dans les îles Féroé et au Groenland. L’ouverture du consulat devrait avoir lieu durant l’été. L’Islande est le seul pays qui possède actuellement un consulat à Nuuk. Sources : le 24 avril 2020 (a), Altinget le 28 avril 2020.
ISLANDE
Malgré une amélioration de la situation sanitaire en Islande, l’État risque de n’avoir que quelques connexions aériennes restantes à la sortie de la crise
Après le déconfinement, le maintien des connexions aériennes reste incertain en Islande.
Après le 15 avril 2020, les connexions aériennes risquent d’être réduites au minimum. En effet, l’accord passé entre Icelandair et le gouvernement arrivera à son terme, stoppant ainsi les vols de rapatriements des nationaux islandais. Les frontières islandaises restent ouvertes mais cela n’impliquera pas forcément une reprise du trafic aérien de destination ou de transit. À la mi-avril, moins de dix nouveaux cas étaient enregistrés en Islande, qui se prépare à un déconfinement graduel à partir du 4 mai.
Le gouvernement islandais prend des mesures pour éviter une nouvelle fuite de pétrole provenant du navire britannique El Grillo
L’Islande craint une nouvelle fuite du bateau britannique El Grillo, coulé en février 1944 lors d’un raid allemand.
Le 17 avril, le gouvernement a approuvé une demande du ministre de l’Environnement de 243 000 € (ISK 38 millions) afin de souder la structure du bateau au béton pour empêcher de nouvelles fuites. Les réservoirs du El Grillo, navire britannique coulé en février 1944 lors d’un raid allemand, ont déjà été pompés en 1952 et 2001, mais les fuites continuent.
Jean-Paul Vanderlinden (CEARC), Magali Vullierme (CEARC), Michael Delaunay (CEARC)